L’histoire d’un bâtiment, l’histoire du travail de plusieurs générations, la vie d’un organisme construit de briques, de poutres, de fer, dont le cœur tourne grâce à la force d’une rivière, dont le feu réchauffe le cœur, et qui respire de la fumée de sa grande cheminée. Il se nourrit de charbon et de marne (argile), et il crache des briques. Cet organisme construit à la fin du XIXe siècle est toujours debout. Un incendie a détruit cet être fabuleux, en 1957. Il ne lui restait que la peau et les os. De ses cendres, le phoenix s’est relevé. Ses murs sont de nouveau solides. Son toit a été reconstruit, et aujourd’hui il donne vie à de nouvelles activités : le cirque, le sport, la musique, la littérature et la sculpture.
Bernard Rondé-Oustau, arrière-petit-fils d’un des fondateurs de la briqueterie, nous en a parlé lors d’une conférence organisée par la Société du Patrimoine du Muretain. Avec son style à la fois élégant et cordial, Bernard nous a fait découvrir la saga des familles Rondé, Oustau et plus tard, Rondé-Oustau.
Des fibres profondes dans mon inconscient réagissaient devant les images de ce beau bâtiment construit il y a plus d’un siècle. J’imaginais les ouvriers acharnés à le faire vivre, les dirigeants actifs mettant en œuvre leurs ressources d’imagination et leur volonté de fer pour ne jamais permettre à la machinerie de s’arrêter. Les enjeux d’une telle entreprise… J’ai pensé à ce que mes aïeux avaient construit à Saint-Paul-lès-Dax. Une énorme minoterie avec son lac et son canal.
(J’ajoute en 2023 un article du Sud Ouest : Sébastien Ducasse a captivé son auditoire en contant les cent vingt ans de règne de la famille Lartigue, qui exploitait la minoterie et son domaine agricole. L’adjoint en charge de la culture et du patrimoine a également dévoilé le cachet, et notamment la charpente d’un bâtiment acquis par la mairie en 1985 et resté sans entretien. « Fort heureusement, le bâtiment est sain. Il a bien résisté aux outrages du temps et notre objectif est de lui rendre un peu de sa splendeur en conservant son histoire, mémoire de la commune, et en le réhabilitant en Maison des arts. » )
Aujourd’hui elle n’est plus active. Un restaurant moderne s’y est installé, avec une belle terrasse face au lac. Vidéo de l’histoire de la minoterie de Poustagnacq racontée par Sébastien Ducasse, 6ème adjoint en charge de la culture et du patrimoine de Saint-Paul-lès-Dax.
Peut-être le coup de foudre pour la briqueterie quand nous l’avons découverte à Muret il y a sept ans vient-il de cette mémoire familiale, inscrite dans mon ADN comme on dirait aujourd’hui. Nous espérons redonner vie avec nos œuvres à ce beau bâtiment. Nous serons toujours redevables à la famille Rondé-Oustau de nous avoir donné l’opportunité d’exercer notre activité artistique en nous accueillant sur son domaine. A notre arrivée, nous avons sans le savoir installé notre four (le Dragon) à la même place où se tenait le four de la forge. Le feu est de nouveau essentiel pour la fabrication, cette fois ce sont des sculptures. Nous avons passé des semaines à isoler les murs et le plafond contre le froid, à remettre en état les portes, les fenêtres… Dans l’espace de travail de la pierre, nous avons remis en service l’immense pont roulant, qui sert aujourd’hui à déplacer les marbres et les pierres calcaires.
La lumière inonde de nouveau l’intérieur du bâtiment. Le matin on entend les oiseaux. La vue sur les arbres, le calme de ce coin au milieu de la nature, l’immensité de cet espace, le murmure de la rivière, tout est idéal pour que la Poétesse puisse entrer dans son univers de mots et moi, dans celui des formes.
Nous avons bien profité des derniers moments de cet hiver de vie sociale autorisée pour assister à la conférence de Bernard Rondé-Oustau.
(Note septembre 2023 : Juliette et moi, avec le soutien de la famille Rondé-Oustau, avons lancé un projet pour sauver ce beau bâtiment industriel. Notre projet a été sélectionné par la Mission Stéphane Bern. Il représente la Haute-Garonne pour l’année 2022. Les dons de la Mission Bern permettront de rénover une partie de ce site industriel. La Fondation du Patrimoine nous permettra d’obtenir d’autres fonds. Si vous souhaitez participer, vous pouvez nous demander de l’information.)
Nous remercions Bernard Rondé-Oustau d’avoir partagé avec nous ces photos anciennes de la briqueterie. Les trois premières correspondent à l’incendie qui a dévasté le bâtiment en 1957 :
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